Alors que les robots sont regardés de plus en plus souvent comme les nouveaux vecteurs d’un chômage de masse, le robot collaboratif, ou cobot, propose exactement le contraire : une machine qui ne peut se passer de l’Homme. Mais jusqu’à quand ?
Les cobots tirent leur nom de la contraction des termes anglais «collaborative robots». Ces robots d’un nouveau genre ont une particularité: ils travaillent en collaboration avec un humain, dopant sa productivité en le délestant des missions les plus ingrates, éprouvantes et répétitives. Alors que les robots sont regardés de plus en plus souvent comme les nouveaux vecteurs d’un chômage de masse, les cobots proposent exactement le contraire : une machine qui travaille main dans la main avec l’Homme.
BMW a par exemple installé des cobots qui travaillent à côté des employés sur les chaînes de montage de son usine américaine de Spartanburg (Caroline du Sud). Ils s’occupent notamment de l’isolation et de la protection des matériaux électroniques dans les portes des voitures. Des tâches éreintantes que les employés ne pouvaient effectuer plus d’une ou deux heures d’affilée sans ressentir des douleurs aux coudes.
Un enjeu de santé
Cette capacité à réduire la pénibilité au travail et les problèmes de santé des employés intéresse l'industrie. Le maniement d’objets lourds lors d’activités très répétitives peut entrainer différentes troubles musculo-squelettiques (TMS). Le Département du travail américain (l’équivalent du Ministère du Travail) estime que « les troubles musculo-squelettiques liés au travail causent plus de 600 000 blessures et maladies » chaque année aux Etats-Unis, soit 34% des jours de travails perdus. En France, les TMS sont même la première cause de maladie professionnelle.
Les robots collaboratifs peuvent être utiles dans ce domaine. On peut citer le cobot A7.15 développé par la société française RB3D. Il s’agit d’un bras mécanique d’assistance au meulage. Malgré son envergure, l’opérateur humain peut le déplacer sans effort. Il suffit d’un léger mouvement dans une direction pour que cette machine truffée de capteurs comprenne l’intention du travailleur et bouge en conséquence. Jugez plutôt:
Hors des cages
Dotés d'une capacité à remplir des missions plus variées et plus précises que les appareils classiques, les robots collaboratifs sont également plus simples à programmer et à manier. Mais cette interaction entre humain et robot est avant tout rendue possible par des progrès en termes de sécurité. Les machines utilisées traditionnellement dans l’industrie sont retranchées derrières des cages pour éviter les accidents.
Rien de tel avec des cobots, qui remplissent des missions moins dangereuses et peuvent évoluer dans le même espace de travail que les employés. Ils sont également conçus pour détecter et prévenir les erreurs humaines. Et comme en prime, les cobots sont très abordables -on trouve de nombreux modèles entre 20 000 et 30 000 euros-, tout laisse présager leur envol.
Des travailleurs plus efficaces
Cette collaboration étroite entre humain et robot entraine également des gains de productivité, explique Robin Rivaton, économiste et membre du Conseil scientifique de la Fondation pour l’innovation politique (Fondapol). « Le cobot s’occupe des parties les plus fatigantes et répétitives, ce qui libère du temps à l’employé pour travailler sur des étapes de la production dont aucune machine n’est capable de se charger. Ce n’est même pas une complémentarité entre robot et humain sur des tâches similaires, l’un sera toujours meilleur que l’autre selon les situations. »
L’un des meilleurs exemples de cette complémentarité est le cobot Baxter. Il est capable de donner des objets et de détecter ceux qu’on lui tend pour les saisir. Baxter fonctionne par mimétisme : pour lui apprendre à réaliser une nouvelle action, il suffit de lui monter comment faire en accompagnant ses mouvements. Il mémorise la marche à suivre et peut ensuite s’en sortir tout seul. Pour en savoir plus sur son fonctionnement:
Et pour voir Baxter en conditions réelles à l’usine:
Cobots et humains, une alliance de raison
Mais quelles conséquences le cobot aura-t-il sur l’emploi ? Selon une étude menée par l’université d’Oxford, d’ici vingt ans, 47% des emplois américains sont menacés par l’automatisation. D’après son co-auteur Michael Osborne, membre du groupe de recherche sur l'Intelligence Artificielle de l’université d’Oxford, les cobots ne pourront pas encore complètement remplacer les humains. « Nous avons identifié trois domaines dans lesquels les robots ne pourront pas se substituer aux humains dans les vingt prochaines années: la créativité, les interactions sociales, les tâches de perception et de manipulation. »
Et c’est ce dernier point qui rend les humains indispensables selon le chercheur. « Baxter est une machine formidable, mais vous ne lui feriez certainement pas confiance pour tenir votre bébé. Les cobots ont encore des difficultés à manier des objets fragiles sans les casser. Ils n’ont pas non plus les capacités intellectuelles des humains qui leur permettent de scanner un pièce à la recherche d’un objet ou d’identifier des erreurs. »
Les robots collaboratifs ont donc encore besoin des humains, mais pour combien de temps ? « Il ne faut pas tomber dans l’angélisme avec les cobots, met en garde Robin Rivaton. C’est un type de robot différent et plus évolué, mais il n’a pas vocation à maintenir l’emploi. On peut très bien imaginer une usine remplie de cobots qui travaillent sans humains. Ils peuvent être collaboratifs entre eux. » Michael Osborne abonde : « A long terme, dans une cinquantaine d’années, l’objectif sera de remplacer complètement les hommes par des machines. »